lundi 14 mars 2016

El camino

En janvier, j'ai eu le grand bonheur de faire la rencontre (pas d'autre mot possible !) d'un roman lumineux
comme je n'en avais pas lus depuis longtemps.

 
























Le vestibule des causes perdues, premier roman de Manon Moreau, raconte l'épopée commune d'êtres esquintés par la vie sur le chemin de Compostelle.

"Ce qui est terrible quand on marche, c'est qu'on cogite, on pense... Mara avait une théorie : les pieds tapent sur la terre,
le sang remonte dans le cœur, c'est l'énergie de la terre qui gagne l'esprit, tout est bouleversé."


J'ai l'ai lu à grandes enjambées puis, comme les pèlerins qui ne veulent pas voir le chemin s'arrêter, j'ai ralenti le pas, pour ne pas terminer ma lecture trop vite, pour que ça dure encore un peu...

"Sans crier gare, un jour, le chemin prend fin. Peut-être parce qu'il faut laisser sa place à d'autres."


Ce qui est drôle c'est que j'ai depuis longtemps cette idée qu'un jour j'aimerais bien moi aussi me lancer sur les chemins de Compostelle. Absolument pas par piété religieuse -comme c'est également le cas pour les personnages du roman- mais juste parce que ça doit être une telle aventure !
 

"Isabel racontait comment elle était arrivée là, à Los Arcos. Un temps mort entre deux missions, sa mère qui lui parlait des pèlerinages, de Rome, de Lourdes, de Jérusalem, de Compostelle. Parmi tous ces noms, c'est Compostelle qui faisait le plus rêver Isabel : ça sentait moins l'eau bénite que Rome ou Lourdes, et plus accessible que Jérusalem. Et puis, marcher, partir avec un sac à dos, un carnet, un crayon : elle adorait, c'était l'essentiel de sa vie (...)"
 
La langue est simple et belle, ne prend de détour que lorsque la route est plus belle ainsi.
Le chemin allant, les pages égrènent de doux noms familiers de mes étés aveyronnais : Saint-Chély d'Aubrac, Espalion, Espeyrac, Saint-Pierre de Bessuéjouls...Les personnages cabossés sont si attachants et si authentiques qu'on les voudrait réels, l'un d'eux élabore des théories selon laquelle Dieu serait probablement Tom Waits...
Bref, autant de détails qui font que je me suis sentie très proche de ce livre.


"En quittant Rabanal del Camino, le chemin gagne les cimes merveilleuses. Au loin des montagnes à perte de vue, des montagnes bleu et mauve dans le levant. L'odeur du thym et de la bruyère, l'ombre des premiers châtaigniers. La couleur de la terre change sous nos pas, c'est le sommet du monde. Et puis soudain, le chemin dégringole, traverse des villages aux toits d'ardoises, frôle des buissons de sureau, trébuche sur les pierres, jusqu'à cet arbre, tout au fond de la vallée. L'arbre aux messages. Planté au bord du ruisseau tel un grand oiseau de bois et de papier : son tronc et ses branches sont semés de petits mots laissés là par d'autres pèlerins. Il y a des prières, une énigme, des nouvelles de ceux qui ont quelques jours d'avance. Une certaine Carmen dit à un Pierre qu'elle espère le revoir à Compostelle ; Antonia et Patrick souhaitent bonne route à tous ; Markus et Yvonne ont dessiné de petits bonshommes en route vers le couchant, et ont écrit des mots d'encouragement dans leur langue."

Et surtout l'idée constante et confiante que quoiqu'il arrive, chacun trouvera ce qu'il est venu chercher, le chemin saura apporter le nécessaire au moment venu.
Un peu quand le hasard, heureux, vous met entre les mains un livre qui tombe à point nommé.


"- N'empêche tous tes bouquins, ça ne vaudra jamais le soleil quand tu marches, comme aujourd'hui. Quand tu lis t'es enfermé, t'es pas dehors, tu bouges pas, tu marches pas.
- Pas du tout, il y a des livres qui voyagent et d'autres qui te disent de partir."

Bref : bonne lecture, bon vent !

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